visite d'expo(s) : DEWAR et GICQUEL à NANTES

à l'été 2017 le VAN (Voyage à Nantes) a choisi - ou du moins son mythique directeur Jean Blaise - d'exposer le duo d'artistes contemporains DEWAR et GICQUEL dans deux sites : le cours Cambronne (en plein air) et la HAB galerie (salle d'exposition permanente dédiée à l'art contemporain et quasi annexe du FRAC Carquefou) .

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Daniel Dewar (anglais, né en 1976) et Grégory Gicquel (français, né en 1975) se sont rencontrés aux beaux-arts de Rennes et depuis travaillent ensemble.
Ils se sont distingués en réalisant une sculpture nommée "Gisant 175", un homme-grenouille gisant en dolérite, commande d'un collectionneur devant lui servir de pierre tombale, et récompensée par le prestigieux prix Marcel-Duchamp en 2012.

Créé en 2011 le VAN est un évènement estival d'envergure en Loire Atlantique pendant lequel les visiteurs suivent dans le territoire nantais la célèbre "ligne verte" reliant des œuvres au cœur de l’espace public, des lieux festifs, des croisières singulières, des musées et lieux patrimoniaux, des lieux de vie, des installations sur des commerces ou encore des expositions temporaires.

Un accent tout particulier est mis sur l'art contemporain : n'oublions pas que Jean Blaise fut le promoteur (tant décrié) et l'instigateur des trois éditions d'Estuaire, manifestation d'art contemporain pour laquelle une trentaine d’œuvres ont été réalisées in situ, à Nantes, Saint-Nazaire et sur les 60 km de la Loire qui les relient. Si certaines créations ont été éphémères, d’autres, installées définitivement, composent un parcours ouvert à la visite toute l’année.
Et hélas, une de ces structures, la "villa cheminée" -structure habitable- de Cordemais a brûlé voici quelques jours.

Donc cette année 2017 sur la ligne verte le cours Cambronne, petit espace secret piéton ombragé dominé par la statue du Général ou on vient lire et flâner la journée (il est fermé la nuit), a accueilli trois pièces monumentales de DEWAR et GICQUEL intitulés "LES NUS", sculptures  en marbre rose du Portugal représentant des lavabos, WC et autres bidets.
Représenter les objets avec lesquels l'homme est en contact au quotidien, c'est un moyen pour le duo d'artistes d'approcher avec humour le corps humain :
"sans avoir à traiter la chair" précise Daniel Dewar.
Ces mobiliers sanitaires sont à l'état d'ébauche, pas encore terminés et sortis de leur gangue : ils évoquent ces sites, ces carrières ou le visiteur découvre les étapes du processus de taille ou de sculpture figé, comme sur l'ile de Pâques avec les Moaï, oeuvres en devenir qui ne limitent ni n'enferment le regard.On pense aussi à l'urinoir ready-made de Marcel Duchamp, amusante collusion pour des lauréats du prix Duchamp !
Juxtaposés, inutilisables, ils sont comme des fossiles d'éléments triviaux dans un matériau noble, effet accentué par la présence d'une jambe, élément disparate, incongru et vaguement inquiétant, qui renvoie pourtant à la statuaire classique ou antique, comme la couleur rose renvoie à la chair nue.

La HAB galerie est installée sur l'île de Nantes, quai des Antilles au Hangar 21, plus connu sous le nom de "Hangar à bananes", nom tiré du passé portuaire de Nantes. Construit en 1950, il était le lieu où les fruits exotiques, bananes et ananas venant d’Afrique étaient déchargés, en 2007 il fut réhabilité à l’occasion de la première édition d'Estuaire .

L'exposition titrée "LE NU ET LA ROCHE" comporte deux parties : LE NU pour des oeuvres réalisées pour cette exposition et LA ROCHE pour des oeuvres prêtées par des collectionneurs.
A l'entrée de la galerie, le visiteur est accueilli par un mocassin à gland surdimensionné, première des sculptures en pierre (roches telles que le grès, le granit, le marbre, la dolérite) parmi lesquelles on trouve pour la partie LA ROCHE un crabe, une combinaison de pêcheur (ou wader) sculpture en ronde-bosse et coquille vide d'un corps absent dressée comme un hommage à la statuaire classique, une palme orpheline et toujours dans ce thème transversal aquatique le fameux "Gisant 175", homme grenouille luisant habillé de sa combinaison de dolérite noire (une roche volcanique née du feu), à la fois pierre, eau et feu, et qui renvoie irrésistiblement aux gisants du tombeau (un chef d'oeuvre) du duc de Bretagne François II et de sa femme en la cathédrale de Nantes.
Pour la partie "LE NU" on trouve au mur des panneaux en marqueterie de pierres colorées , point d'orgue de la réflexion des artistes sur l'utilisation de la couleur, pierres jointurées avec du ciment composant des motifs tels que robinet, lavabo, distributeur de savon, théière, pipe ou ...un postérieur.
Au sol on trouve un parallélépipède juxtaposant une paire de jambes avec un lavabo, et de grands bas reliefs rectangulaires installés verticalement (je ne peux m'empêcher de penser à Han Solo, congelé dans l’épisode V de Star Wars dans de la carbonite), pièces taillées dans le même marbre rose que les sculptures du cours Cambronne, avec quelques fragments identifiables, anatomiques ou non : un pommeau de douche, un porte savon, une jambe, une main, un pénis,...
Tous ces objets et motifs évoquent de façon plus ou moins symbolique le corps humain, en leur qualité de vêtements, d'objets usuels du quotidien, comme fragments anatomiques ou pour l'intimité que leur usage imposerait (les sanitaires).